Transition agroécologique en Polynésie française : gouvernance et résilience face aux défis climatiques et alimentaires

Abstract

[FR] Cet article propose une analyse approfondie de la transition agroécologique en Polynésie française, en confrontant le potentiel de résilience des pratiques agricoles locales aux défis structurels majeurs qui entravent son institutionnalisation. L’étude repose sur une approche mixte (qualitative et quantitative) menée sur neuf terrains d’étude représentatifs des archipels, ce qui permet de caractériser la diversité des systèmes de production, de la micro-exploitation vivrière à la filière de niche à forte valeur ajoutée. Les résultats démontrent une vitalité agricole significative, notamment à travers l’omniprésence de l’autoconsommation (estimée à 18 milliards Fcfp) et l’adaptation exceptionnelle aux contraintes insulaires par des techniques comme l’agroforesterie (fa’a’apu) et le compostage insulaire. Cependant, l’article révèle que la généralisation de cette transition est compromise par le blocage foncier lié à l’indivision, qui paralyse l’investissement productif et compromet le renouvellement générationnel du secteur. La discussion propose, dès lors, des leviers de gouvernance concrets – notamment la création d’une foncière agricole publique et l’établissement de mécanismes de garanties innovantes – pour débloquer le financement et assurer la pérennité et la souveraineté alimentaire de la Polynésie française.

[EN] This article offers an in-depth analysis of the agroecological transition in French Polynesia, comparing the resilience potential of local agricultural practices with the major structural challenges that hinder its institutionalisation. The study is based on a mixed (qualitative and quantitative) approach conducted in nine representative study areas across the archipelagos, which makes it possible to characterise the diversity of production systems, from micro-subsistence farming to high value-added niche sectors. The results demonstrate significant agricultural vitality, particularly through the ubiquity of self-consumption (estimated at 18 billion Fcfp) and exceptional adaptation to island constraints through techniques such as agroforestry (fa’a’apu) and island composting. However, the article reveals that the widespread adoption of this transition is compromised by land ownership issues linked to joint ownership, which paralyses productive investment and compromises generational renewal in the sector. The discussion therefore proposes concrete governance levers – notably the creation of a public agricultural land agency and the establishment of innovative guarantee mechanisms – to unlock financing and ensure the sustainability and food sovereignty of French Polynesia.

DOI : http://dx.doi.org/10.15551/lsgdc.v53i2.03